Fait nucléaire: le CESEC présente la facture

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Dans le cadre de la future Table ronde de haut niveau sur le fait nucléaire qui doit se tenir dans les semaines qui viennent à Paris sous la présidence d’Emmanuel Macron, le CESEC (Conseil économique, social, environnemental et culturel), quatrième institution polynésienne, vient d’adopter un voeu pour que la France -qui a reconnu les méfaits des expérimentations- assume un certain nombre de dépenses inhérentes à la prise en charge des malades du cancer. Détail de la facture…

La Polynésie française est au cœur d’une réalité géo-économique et géopolitique qui résulte du déplacement du centre de gravité de l’économie mondiale de l’Atlantique vers le Pacifique. Notre volonté commune est de renforcer l’ambition de l’Union Européenne et de la France en contribuant à la paix et la stabilité du plus grand espace maritime mondial. La Polynésie française en est un point de convergence stratégique exceptionnel : sa situation, ses dimensions, son isolement, ses spécificités culturelles et environnementales sont devenus de remarquables atouts dans un contexte international d’incertitudes, d’insécurités et de menaces grandissantes face à l’hégémonie des puissances étrangères avides d’exploiter ces espaces maritimes, jusqu’aux confins de l’Antarctique encore protégé par le Protocole de Madrid jusqu’en 2048.

La France, à travers la loi Morin de 2010, a reconnu que les essais nucléaires avaient eu des conséquences sanitaires importantes et qu’elle devait réparation afin d’amorcer la réconciliation avec les Polynésiens. Force est de constater qu’après onze années de procédures administratives, juridiques et d’interminables processus politiques, le but fixé par la dite loi est très loin d’être atteint.

La CPS, société de droit privé, a assumé toutes ses responsabilités quant à la prise en charge médicale ou accidentelle de tous les résidents polynésiens atteints d’une des vingt-trois maladies radio-induites de la loi Morin, pour un montant cumulé évalué à 80 milliards de francs CFP (670 millions d’Euros), et même au-delà en prenant en charge les maladies radio-induites non encore reconnues telles de nombreuses maladies cardiovasculaires. La CPS couvre ainsi chaque année, pour 5,2 milliards de francs CFP (43,576 millions d’Euros), les dépenses des services d’oncologie, et la prise en charge des malades. Ces essais ont été décidés au nom de l’idéal de liberté, d’indépendance et du bonheur des populations, permettant la dissuasion nucléaire, exclusivement défensive selon le principe de la légitime défense, qui remplit dès lors une mission éthique, celle d’empêcher une guerre.

Le CESEC sensible aux peines et aux difficultés rencontrées par les familles éprouvées, demande d’indemniser toutes les victimes et leurs ayants-droits.

Jusqu’à présent, les services de l’Etat nous opposaient des conclusions variables dans le temps, suivant l’évolution de la science ou des spécialistes du nucléaire. Pendant des décennies, on a entendu parler de « bombes propres », d’innocuité des essais, de risques négligeables ou insignifiants. Il est vrai que le Président de la République, François Hollande, en février 2016, a reconnu très dignement le fait nucléaire au nom de la France, on peut regretter qu’il n’y ait eu d’avancements notables.

Dans le cadre de la « table ronde relative au fait nucléaire », la société civile organisée souhaite que soient prises en compte les dépenses suivantes, mises à la charge de la Polynésie française : le remboursement des dépenses engagées par la CPS, soit 80 milliards de FCFP (environ 670 millions d’Euros) ; la prise en charge des services d’oncologie à hauteur de 5,2 milliards de FCFP par an (environ 43,576 millions d’Euros/an). De la même manière, le CESEC préconise une dépollution en profondeur de l’atoll de Hao, ainsi que la mise en place d’une redevance (que l’on pourrait estimer à 150 XPF/m2 /mois), au titre de la location des laboratoires vivants que sont Moruroa et Fangataufa, transformés en dépotoirs nucléaires. Enfin le CESEC demande que la Polynésie française bénéficie de la CSPE : 13 milliards de FCFP par an (environ 109 millions d’Euros/an). La CSPE (Contribution au Service Public de l’Electricité) a été instituée, via la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, pour financer les charges dites de solidarité des « Zones Non Interconnectées » (ZNI) au réseau électrique de l’hexagone dont 77 % de l’électricité est assuré par le nucléaire. Cette CSPE a été étendue à la quasi-totalité des collectivités d’Outre-mer, hors la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. Or, seule la Polynésie française a subi les méfaits du nucléaire sans en bénéficier des bienfaits.

Au vu des éléments qui précèdent, et dans l’intérêt d’une reconnaissance effective du fait nucléaire et de ses conséquences, le CESEC émet le vœu que ces questions relatives au fait nucléaire soient inscrites prioritairement aux travaux de la table ronde de haut niveau sur le nucléaire à laquelle participera une délégation polynésienne.

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