Le CESEC fait du diabète « un défi vital pour la Polynésie »

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Les conseillers ont examiné et adopté à l’unanimité en assemblée plénière, ce vendredi 8 novembre, le projet de rapport d’autosaisine du CESEC : « Le diabète: un défi vital pour la Polynésie ».

Face à un défi aux enjeux majeurs, la politique publique de santé est restée inefficace, la maladie a continué de progresser dans des proportions alarmantes, malgré une mobilisation des mouvements associatifs et des partenaires concernés.

Les hospitalisations et la dialyse constituent les premiers postes de dépense de la pathologie, la fréquence ainsi que la gravité des complications ne diminuant pas.

Les chiffres de 2018 mettent en lumière que les ressortissants couverts par les quatre régimes sont au nombre de 272 468 et qu’ils représentent 58,24 milliards de dépenses maladie (prestations nature). Les patients diabétiques sont au nombre de 10 045 en longue maladie et de 2 868 en maladie, représentant  4,7 % de la population couverte. Ils génèrent 10,689 milliards de FCFP (10, 369 milliards de F CFP en longue maladie et 320 millions en maladie) de dépenses en maladie, soit 18,35%.

Pour le CESEC, le Pays doit prendre en urgence les mesures préventives et curatives qui s’imposent pour riposter efficacement contre l’aggravation dramatique de cette situation. Pour ce faire, le patient doit être placé au cœur des dispositifs et les décideurs politiques doivent faire preuve d’un engagement sans failles.

Des partenariats constructifs, associant les pouvoirs publics, la société civile et le secteur privé ainsi qu’une responsabilisation de chaque individu pourront produire les changements nécessaires pour endiguer le phénomène, et à terme, inverser la tendance actuelle.

 Le CESEC a mis en lumière des mesures et actions qu’il considère prioritaires. Certaines d’entre elles méritent d’être rappelées : 

En matière de prévention et de promotion de la bonne santé : 

–       Mener des campagnes de communication efficaces et encadrer strictement le marketing alimentaire ;

–       Redonner aux familles l’envie de cuisiner ;

–       Lutter contre la sédentarité via la promotion de moyens de transport actifs, des installations et matériels sportifs adéquats et abordables ;

–       Agir sur les habitudes alimentaires en milieu scolaire tout en favorisant l’activité physique et sportive ;

–       Améliorer et renforcer la médecine scolaire et le suivi médical des enfants ;

–       Instaurer un cordon sanitaire aux abords des établissements scolaires par le biais d’un encadrement strict des produits vendus et d’un agrément sanitaire ;

–       Agir sur la nutrition et favoriser la pratique d’une activité physique dans le monde du travail ;

–       Développer le suivi médical des salariés par le biais de la médecine du travail qu’il est nécessaire de faire évoluer et renforcer ;

En matière d’économie et de fiscalité :

–       Prendre des mesures fortes combinant taxes et subventions, afin de rendre financièrement plus attractifs les produits « sains » et moins intéressants les produits « malsains » (trop sucrés, trop gras, trop salés) ;

–       Agir sur la taxe sur le sucre (augmentation des prix d’au moins 22% comme en Nouvelle Calédonie) ;

–       Elargir la taxation, autant que possible, aux aliments riches en mauvaises graisses et en sel ;

–       Revoir la liste des PPN en fonction de critères sanitaires souhaités, des écarts de prix entre produits locaux et importés et intégrer des critères de qualité notamment dans la procédure d’appel d’offres de la farine ;

–       Programmer par voie réglementaire, des objectifs échelonnés dans le temps, de composition nutritionnelle saine par familles d’aliments, pour les importations et les productions, en collaboration avec les importateurs et industriels locaux, afin d’adapter leurs activités.

En termes d’amélioration de la qualité des produits alimentaires locaux :

–       Adopter un Schéma directeur de l’agriculture qui favorise un approvisionnement régulier et un développement de circuits courts ;

–       Soutenir fortement l’agriculture biologique via la restriction de la vente et de l’utilisation de produits chimiques ;

–       Encadrer la production alimentaire industrielle locale pour réduire la quantité de sucre, de graisses et de sel ;

–       Améliorer l’information des consommateurs et la traçabilité des produits (étiquetage nutritionnel) ;

En matière de prise en charge optimale de la maladie :

–       Rendre obligatoire le dépistage du diabète à partir de l’âge de 40 ans ;

–       Adopter urgemment un panier de soins spécifique dont le mode de financement ne doit pas reposer sur les seules cotisations sociales mais également sur une contribution du Pays ;

–       Mettre en place une éducation thérapeutique et un accompagnement soutenu pluridisciplinaire grâce à une structure dédiée ;

–       Maîtriser les coûts via le développement de la greffe rénale ;

–       Financer l’offre de traitement de l’insuffisance rénale via le budget du Pays ;

En termes de gouvernance et de pilotage de l’ensemble de ces mesures :

–       Adopter une véritable politique publique de lutte contre le diabète, augmenter le budget et les moyens dédiés à la prévention par le biais des mesures fiscales et économiques préconisées en amont ;

–       Créer une délégation à la prévention de l’obésité et du diabète, placée sous l’autorité du Président de la Polynésie française, chargée de coordonner planifier et piloter efficacement les mesures liées à la lutte contre l’obésité et le diabète ;

–       Faire de l’évaluation une priorité en développant une méthodologie et des indicateurs de suivi (à court, moyen et long terme) pour avoir une bonne connaissance épidémiologique, orienter les financements, optimiser les moyens et apporter les corrections nécessaires.

Ces mesures méritent de s’inscrire dans un plan d’action concerté et coordonné à l’horizon 2030, et leurs résultats analysés avec une acuité accrue.

Selon les sociologues, le concept même de promotion de la santé implique qu’ : « en l’état actuel des connaissances, une société ne peut plus prétendre bien s’occuper de la santé de sa population simplement en lui fournissant des services de soins, (…) elle ne peut plus uniquement renvoyer la balle à ses membres, en leur disant qu’ils et elles sont responsables de leurs habitudes de vie et, dès lors, de leur santé. Une société doit se préoccuper de la qualité de l’environnement social qu’elle crée ».

La situation d’urgence sanitaire que connaît la Polynésie française en matière de diabète requiert une reconnaissance solennelle de nos décideurs publics que ce fléau constitue la cause prioritaire absolue.

 

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