Le gouvernement veut « délocaliser » 1500 postes administratifs d’ici à 2037

Le gouvernement Brotherson quasiment au grand complet a dévoilé, ce mardi matin, son projet « très ambitieux » de décentralisation d’une partie de l’administration polynésienne dans l’espoir de créer un second pôle d’activité économique à la presqu’île de Tahiti.
Sur le papier, c’est alléchant. Le discours officiel est huilé, bien argumenté. Les chiffres ne manquent pas et donnent du sens à l’objectif visé. A la manoeuvre, le benjamin de la « dream team », Jordy Chan, en charge de l’Equipement et de l’Aménagement du Pays. Un des rares ministres, il est vrai, omniprésent sur le terrain et sur les réseaux sociaux. Le communicant parfait en quelque sorte !
Le constat est imparable: le grand Papeete concentre à ce jour plus de 50% de la population et plus de 80% des emplois sur l’île de Tahiti. Il est temps d’inverser la tendance, ou plutôt de rééquilibrer les forces en présence. Et en douceur, s’il vous plaît…tant il convient de ne pas trop brusquer les individus.
Sur les 6 000 agents de la Fonction publique du Pays, il ressort que 90% travaillent dans le grand Papeete. Or, à en croire Jordy Chan, « on a l’opportunité de les décentraliser aujourd’hui… » Mais plus que « l’opportunité » qui serait offerte aux décideurs, le gouvernement se veut exemplaire. Dans l’espoir que d’autres (acteurs privés) suivent le mouvement.
Dans la pratique, le plan paraît ficelé: la délocalisation sera programmée sur douze ans (2025-2037) mais la première phase n’interviendra qu’en…2032. Soit quatre ans après les prochaines élections territoriales de 2028 au cours desquelles la majorité Tavini huiraatira devra convaincre la population qu’elle a fait « le taf ». Autant dire que la partie n’est pas gagnée…Trois sites accueilleront cette décentralisation: Mahina pressenti pour le « pôle Education », Papara avec son « pôle Ressources primaires » et Taravao avec un « pôle Aménagement » centré autour des grands travaux et du logement-foncier.
D’ici à 2037, ce sont donc près de 1500 postes administratifs (parmi les entités de l’Economie numérique, de la direction du Budget, le Service de l’emploi, l’Institut de la statistique, la direction des impôts, les Affaires économiques, etc) qui devraient être relocalisés pour un coût d’investissement estimé à 27 milliards de francs pacifique. Financement garanti par le recours à l’emprunt. Après avoir enclenché le désendettement du Pays, le gouvernement Brotherson entend lui aussi faire appel à l’argent facile. Pas sûr que le « Grand argentier », Warren Dexter, approuve la stratégie.
Objectif: faire de Taravao une « agglomération dynamique, agréable, durable et équipée », assure le ministre Jordy Chan, avec à la clé l’aménagement d’un parc Phaeton sur 6-7 hectares, d’une nouvelle clinique-maternité, la rénovation du collège de Taravao, sans parler d’un axe de contournement de Taravao pour préserver la tranquillité du centre-ville.
Si le président Brotherson indique que « les communes ont été consultées sur ce projet », en revanche, il manque de nombreuses pièces au puzzle! A commencer par l’absence de PGA à Taiarapu-est. Quid également des voies de circulation entre Papeete et Taravao dont l’élargissement ne semble pas être d’actualité. Quant aux agents concernés…comment vont-ils accueillir la nouvelle d’une relocalisation à Taravao ou Papara ? « Le projet a été présenté au Conseil supérieur de la fonction publique », a déclaré la ministre de tutelle Vannina Crolas. Sans plus de détails. Mais qu’ils se rassurent: une large communication sera faite en amont.