Disparition de Roland Oldham à l’âge de 68 ans

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Nous venons d’apprendre la disparition de Roland Oldham qui a voué sa vie à la lutte anti-nucléaire et à la défense des anciens travailleurs de Moruroa e tatou. Voici son portrait en guise d’hommage.

Il est né le 3 octobre 1950 à Papeete. Il est le petit-fils de Tearapo Pouira Teauna (conteur des mythes polynésiens). On le connaît surtout au travers de ses fonctions de président de l’association Moruroa e tatou.

Après des études jusqu’en Terminale, il épouse la carrière d’instituteur à Moorea pendant une année, puis il travaille à la Brasserie de Tahiti avec Dexter Cave.

Mais Roland Oldham a soif de découvertes ! Il part d’abord en Nouvelle-Zélande et se marie sur place avec une native du pays. Après son divorce, il part vivre à Sydney en Australie pour trois ans. Il ne rentre au pays qu’en 1983. « Je l’ai ressenti au fond de moi : il fallait revenir. Mon chemin était tout tracé, j’allais m’engager pour défendre le droit des travailleurs polynésiens », disait-il.

Avec Michel Buillard, son ami d’enfance, alors ministre du logement, il participe à la mission de reconstruction des maisons détruites par plusieurs cyclones durant cette période (Veena notamment) au travers de la CAH (ex OTHS et ex OPH). Parallèlement, il participe à la création du syndicat A Tia I Mua dont il devient rapidement une des figures dirigeantes. En 1992, il crée son propre syndicat, le SIDT (Syndicat Indépendant et Démocratique des Travailleurs polynésiens).

Vers 1995, il s’engage dans la lutte antinucléaire avec Greenpeace. Il fonde enfin, avec des personnalités bien connues du Fenua, l’association Moruroa e tatou en juillet 2001. A la tête de cette organisation, il va se dévouer corps et âmes pour faire reconnaître par l’Etat français les conséquences, sanitaires, économiques et sociales des expérimentations. En 2018, il va même jusqu’à demander à ce que cette date soit déclarée « fériée » pour ne pas oublier les conséquences des essais qui continuent de toucher la population.

Homme sage à la détermination et l’énergie intactes, ses prises de parole sont redoutées, ici comme en métropole. Dans un article intitulé « L’envers du décor paradisiaque de Tahiti », voici ce qu’il déclarait début 2016, quelques jours avant la visite du président de la République, François Hollande, en Polynésie française : «Les essais nucléaires ont bien sûr contaminé le Pacifique et causé des dommages environnementaux irréversibles, mais ils nous ont aussi enfermés dans une terrible dépendance économique et culturelle à l’égard de la France», s’indigne Roland Oldham, un militant qui a participé à sa première manifestation contre les essais en 1966, l’année de ses 16 ans et du premier tir sur l’atoll de Moruroa. Il dirige aujourd’hui l’association des anciens travailleurs du nucléaire, qui se bat pour l’indemnisation des victimes. «Nous avons déposé près de 900 dossiers, mais la plupart ont été rejetés, en raison de l’article 4 de la loi de 2010, qui introduit la notion de «risque négligeable»: les victimes doivent apporter la preuve que leur cancer est bien dû aux essais, ce qui scientifiquement impossible!» Pour lui, le programme nucléaire français, pourtant arrêté depuis vingt ans, est un «cancer» qui continue de ronger la société polynésienne.

Homme d’action et de pensée, Roland Oldham a mis à profit sa retraite pour accorder une autre corde à son arc, celle de l’artiste. Bluesman reconnu, il peint également, sculpte sur bois et sur Pierre et s’intéresse à la nature avec son propre potager.

Pour conclure, voici une déclaration empreinte de sagesse retrouvée dans le portrait de lui dressé par le Magazine Homme de Polynésie : Le Monde est encore à réinventer, le pétrole, le nucléaire font partie du passé maintenant. Il appartient aux jeunes d’écrire les pages futures. Adepte du yin et du yang, je suis confiant dans la Nature pour trouver un équilibre viable pour le futur. »

La rédaction de Tahitinews adresse ses condoléances à la famille du défunt.

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