26 juillet 2024

Retour sur la première année de gouvernance Brotherson…

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15 mai 2023 – 15 mai 2024: il y a un an déjà, le chef de file de la majorité Tavini huiraatira présentait officiellement sa « dream-team » pour conduire les affaires du pays. C’est donc, en toute objectivité, le moment d’établir un état des lieux des déclarations faites et des actions menées durant ce laps de temps.

Cet inventaire, nous l’avons réalisé à partir des petites phrases prononcées par les intéressés eux-mêmes qui, dés le départ, annonçaient vouloir renverser la table. Mais entre les déclarations d’intention et les actes, il y a comme un décalage qui ne trompe plus personne dans l’opinion publique.

Inflation et TVA sociale

Et pourtant, Moetai Brotherson qui supporte de plus en plus mal la contradiction, continue de soutenir comme le 28 avril dernier sur Polynésie la 1ère, qu’il « n’a pas été élu pour continuer le mirage des éléphants blancs. On ne construit pas un pays sur d’éternelles promesses de grands projets qui ne voient pas le jour ». Mais alors que propose t-il en échange…

Le 19 mai 2023 à l’assemblée de la Polynésie française, le chef de l’exécutif local disait avoir une « pensée (émue ?) pour ceux qui font face à l’angoisse du caddie ». Pour quelqu’un qui a fait de la lutte contre la vie chère son principal thème de campagne aux Territoriales, on peut le comprendre…Mais qu’a t-il fait depuis pour « vaincre l’inflation » ? Quasiment rien, sinon supprimer la TVA sociale et du même coup, les 9 milliards Fcfp de rendement annuel attendu par la CPS pour équilibrer les comptes sociaux. Certes, la hausse des prix va bien ralentir tout au long de cette année – comme d’ailleurs dans le reste du monde – mais les consommateurs polynésiens ne se font pas d’illusion: la valse des étiquettes sur les oeufs, le punu pua toro ou encore les cuisses de poulet, n’est pas au rendez-vous et il est de plus en plus difficile de se nourrir dans nos îles. Même le ministre des Finances, pas toujours convaincant, reconnaissait le 15 juin 2023: « Ce n’est pas parce que l’on va supprimer la TVA sociale que les prix vont automatiquement baisser ». Les faits lui donnent aujourd’hui raison.

Déconstruire…

Autre promesse non tenue par le président Brotherson à la tribune de Tarahoi: « Nous n’allons pas tout déconstruire… » avait-il alors affirmé avec un brin d’humilité, reconnaissant quelque part que des choses bien avaient été réalisées avant son accession au pouvoir. Pourtant, on ne compte plus les projets remis en cause par l’actuelle équipe dirigeante: du Village tahitien à Punaauia au lycée polyvalent d’Opunohu-Moorea en passant par le bassin aquatique de Aorai à Pirae, sans parler du projet SCI Hinoï de l’OPT, c’est toujours la même rengaine: trop cher, trop luxueux. Presque inutile à leurs yeux. Et comme pour prévenir les acteurs de la Construction, il avait même déclaré ne pas vouloir « faire du BTP pour le plaisir du BTP! » Heureusement que son ministre de l’Equipement et des Grands Travaux, Jordy Chan, oeuvre de son côté sans trop faire attention à ces batailles de politique politicienne d’un autre âge en continuant d’inaugurer tous les chantiers initiés avant lui: de la promenade de Motu-Uta dont les horaires ont été étendus le week-end à la future gare de croisière internationale dont la mise en service est imminente. Et de se montrer rassurant: 82 chantiers sont programmés en 2024 pour une enveloppe budgétatire de 20 milliards de Fcfp.

Autre ministre à brasser de l’air: Chantal Galenon dont la mission première est de « dépolitiser le secteur du Logement » et de « construire en fonction de nos besoins ». Depuis cette annonce le 24 mai 2023 aux Tuamotu, force est de constater qu’elle n’a pas beaucoup progressé, si ce n’est d’avoir voulu installer à la tête de l’OPH quelqu’un (Yan Jambet) qui n’en avait pas les capacités et encore moins la probité. Pas de chance non plus après la démission en janvier 2024 de celui qui avait succédé à Moana Blanchard, Oraihoomana Teururai. Il n’aura même pas tenu six mois à la tête de l’Office. En attendant, la ministre multiplie les missions à l’étranger en quête d’idées transposables à la Polynésie. Auckland, Fidji puis la métropole à plusieurs reprises…rien de bon ne sort de ces voyages longs et coûteux. Sauf, peut-être, l’idée abracadabrantesque d’implanter des maison « Tiny houses » pour reloger les sinistrés…

Voyages, voyages…

En revanche, reconnaissons que s’il est un domaine dans lequel ce gouvernement excelle, c’est bien celui des « missions de travail » à l’extérieur de nos frontières. Petit rappel approximatif: du 29 au 30 mai 2023, Brotherson à Séoul-Corée; juin 2023 Crolas au Chili; juillet 2023, Brotherson en Nouvelle-Calédonie; septembre 2023, Brotherson à Paris puis à Washington et New-York; 19 au 22 octobre Tevahitua à Paris; novembre 2023 Crolas à Paris dans le cadre du salon philatélique d’automne; novembre 2023, Brotherson en métropole alors que l’assemblée peste contre le projet de loi fiscal; janvier 2024, Brotherson à Paris; fin février 2024, pas moins de trois ministres (Galenon, Tevahitua et Teai) sont absents du territoire, tous en métropole; du 15 au 29 mars enfin, Brotherson repart cette fois-ci à Singapour dont il vante le modèle économique.

Cette première année de mandature, style Brotherson, a surtout été marquée par des petites phrases stériles, sans lendemain. Comme si le président devait rassurer les militants Tavini sur le fait qu’il n’a rien perdu de sa fibre indépendantiste. Le 7 juin 2023, il commence fort en déclarant: « Nous proposons à la France une décolonisation qui pourra être citée en exemple ». C’était au lendemain d’une visite à Macron. Sur les questions de justice sociale, il se fait également plus tranchant: « Ceux qui ont plus de moyens, contribueront plus », avait-il annoncé début août en compensation du retrait de la TVA sociale. Le gouvernement cherche encore à boucher le trou de 9 milliards…Quant à la reforme de la CST (Contribution sociale territoriale), elle semble tombée aux oubliettes!

« un pays qui a considérablement blanchi ».

Sa vice-présidente n’y va pas avec le dos de la cuillère non plus: « Quand vous regardez les constructions qui se font, il n’y a pratiquement pas de Polynésiens qui peuvent se payer un appartement à 50 millions (…) C’est pas pour nous et ça me révolte ». Heureusement que le député Chailloux se veut plus apaisant: « L’indépendance, ce n’est pas le racisme (…) ce n’est pas virer les gens de notre pays ». A des années lumière, il est vrai, de l’état d’esprit du représentant Mitema Tapati qui, lui, fustige « un pays qui a considérablement blanchi ». A la justice aujourd’hui de qualifier de tels débordements verbaux qui ne sont pas dignes d’un élu du peule…Le ministre de l’Education, Ronny Teripaia, ne fait pas dans la dentelle non plus le 7 mars en commission permanente: « Les Chinois et les Japonais ont la culture du travail, les Polynésiens ne l’ont pas ». Quant au président de l’assemblée, Antony Géros, lui se veut réaliste: « Lorsque j’ai vu la composition de ce gouvernement, j’étais persuadé qu’il leur fallait un temps de latence », a t-il confié le 4 mars dernier. Mais sa patience a des limites.

Sur le reste, il n’y a pas grand chose à dire! Le gouvernement Brotherson avance à son rythme, tout en bénéficiant encore d’une conjoncture internationale des plus favorables. Pour combien de temps encore…?

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